Etienne
: L’amour de la peinture est né très vite, presque instantanément. J’ai grandi en Normandie, terre des impressionnistes, de Monet, Dufy... et mon père est artiste. Ayant vécu à la campagne, dans un tout petit village, le dessin a rapidement été un remède à l’ennui. J’ai toujours eu cette chose en moi qui me disait de devenir artiste, mais j’ai choisi un cursus classique, en communication, pour être sûr de pouvoir subvenir à mes besoins en cas de nécessité. Aujourd’hui j’aime les deux. Mais la peinture me fait vivre des moments incroyables et c’est définitivement elle qui me transporte.
Gabrielle : Avant la peinture ça a d’abord été un amour de travail de matières en observant mes grands mères coudre. Cela m’a appris que la création était illimitée et que l’on peut s’exprimer à partir de ce que l’on voulait. La peinture, c’est plus abstrait pour moi, une porte ouverte pour illustrer directement mes univers. J’aime l’idée d’y mêler de la broderie ou différents éléments, varier les supports, comme les miroirs, les vêtements, parfois même directement sur des plantes. C’est comme un moyen d’amener mon imaginaire dans la réalité.
Etienne
: C’est très souvent ce qu’on lit dans les interviews, et je ne vais pas déroger à la règle : les femmes qui m’ont inspiré en premier lieu sont ma mère, ma grand-mère et au-delà. J’ai toujours préféré retranscrire mes émotions, mes idées et mes humeurs à travers des représentations féminines. Histoire de rappeler que je ne suis pas plus masculin qu’une femme, et qu’elles ne sont pas plus féminines que nous. Mais plus que la femme ou l’homme, c’est l’humain qui est inspirant. D’ailleurs, il n’y a pas de notion de genre quand je fais mes visages abstraits. C’est un peu au public de décider ce qu’il voit.
Gabrielle
: J’ai d’abord commencé à dessiner beaucoup de visages pendant les longues heures d’attente de castings. Pour ma part je m’inspire des événements et des situations que je traverse et lorsque j’ai commencé à voyager j’ai côtoyé beaucoup de filles de pays différents. Je trouve ça très intéressant la façon dont une culture peut sculpter une personnalité, un physique. Merci à mes collègues de travail pour cette source infinie d’inspiration. Mais plus que les visages ce sont les regards qui me fascinent et qui peuvent en dire long sans même avoir à prononcer un mot.
Etienne
: C’est définitivement de plus en plus dur de se faire repérer sur Instagram. Il y a plusieurs valeurs clés, à mon sens, pour réussir à se démarquer : L’inventivité, l’identité, la réflexion, la sincérité et la rigueur. C’est sûr qu’il faut avoir son truc, savoir où l’on va, et ne pas compter uniquement sur le réseau social pour "percer". On ne déjoue les algorithmes qu’avec de bonnes idées. L’avantage d’Instagram, c’est que cela m’a révélé en tant qu’artiste aux yeux de nombreuses personnes. C’est d’ailleurs par ce biais que je vends, que j’échange, que j’expose. C’est fantastique, mais il y a aussi tout le côté superficiel, malsain, chiffré, dont chacun doit réussir à se préserver.
Gabrielle
: J’y pense assez peu à vrai dire, pour moi les réseaux sociaux sont une plateforme de partage, une sorte de galerie. Mais je ne me sens jamais en compétition avec les artistes qui y évoluent. C’est un avantage puisque cela permet à tout le monde de s’exposer mais également un danger pour les plus fragiles. On peut facilement se sentir découragé si l’on prend ça trop à cœur.
Gabrielle
: Pour moi l’art c’est un moyen d’expression. En choisissant ce que l’on porte, inconsciemment on se créer une seconde peau, un personnage. C’est comme enfiler un costume et rentrer dans un rôle (qui peut être le sien ou celui que l’on souhaite). Par exemple en travaillant avec Liz Collins et Gilles Bensimon j’avais vraiment l’impression d’incarner des personnages différents selon le stylisme, la vision du photographe et les sets différents. C’est un peu les costumes d’un grand ballet et cela s’applique aussi dans la vie de tous les jours.
Gabrielle : C’est d’abord parti d’un amusement personnel, j’aime l’idée de m’approprier les vêtements que je porte. Ce qui est intéressant c’est que la même pièce portée par des personnes différentes ne renvoie pas la même attitude. Voir des gens porter ce que je réalise c’est aussi leur donner une autre vie, un autre sens. La création reste la même mais de par leur personnalité, celui qui va la porter lui donnera aussi une autre vie. C’est un vrai partage.
Etienne
: Je n’imagine pas ma vie sans musique. Je suis très éclectique. Je peux écouter du classique comme Satie, de l’alternatif comme Thundercat, du rap ou de la drum’n’bass britannique sans aucun problème dans la même matinée. Il est clair que la musique influence mes créations. Elles me donnent envie de peindre. Parfois, des rimes m’inspirent des peintures. Et puis il y a le rythme qui va déterminer mon trait, l’intensité, l’état d’esprit... Cela m’est arrivé plusieurs fois de commencer à peindre sur un son chill, et de devenir dingue quand ma playlist passait à une musique qui n’avait rien à voir. Cela m’aide vraiment à me mettre dans un mood et ça amplifie le plaisir.
Etienne
: Il y a d’autres projets qui devraient voir le jour mais qui sont mis en stand-by de par la situation actuelle. Mais il est certain que je réfléchis à créer ma marque et ce dans les 5 prochaines années. Quelque chose qui soit écologique, artistique, peut-être unique et fait-main. Quelque chose qui, en tout cas, colle à mes idées.
Etienne
: Bien sûr ! Sans mentir, j’ai longtemps été assez passif face au sujet. Il m’a fallu du temps pour comprendre, mais aujourd’hui, je suis convaincu que chaque acte doit être pesé, mesuré, pour faire le moins de mal au monde possible. Sur la mode, ça passe par des choses simples : le recyclé, le bio, le juste qui rémunère correctement les artistes et la main-d’oeuvre. Il faut aborder le vêtement non pas comme un produit jetable, mais comme une création unique, qui s’altère, et dont ont doit prendre soin.
Gabrielle : Bien sûr, nous sommes arrivés à un point où il me semble irresponsable de faire l’impasse sur cette problématique. En changeant, transformant, embellissant les matières dont on dispose déjà, nous donnons une solution à une industrie qui fonctionne beaucoup trop vite et nous montrons que nous pouvons consommer autrement. C’est un combat qui nous concerne tous, malheureusement je pense que nous sommes mal informés. Tous les acteurs devraient être mieux éduqués à ce sujet; je parle autant des acheteurs que des producteurs.
Etienne
: Il y a 2 ans, j’aurais pu répondre Kanye West, mais il est devenu trop fou ! Il y a mille artistes que j’affectionne et avec qui je serai ravi de travailler. Je compte sur le hasard des rencontres pour faire naître ces collaborations. Pour les marques, c’est pareil. Mais j’aime bien ce que fait MISBHV en ce moment...
Gabrielle :
Je n’ai pas d’envie particulière, tout m’inspire, je suis plus sensible à certaines choses que d’autres mais je ne me ferme pas à toute proposition collaborative.
Gabrielle et Etienne
: On peut dire plus que proches, et oui nous avons déjà commencé ! Nous collaborons souvent ensemble, et là encore, pour le shooting de l’Exception. Nous avons plein d’idées, on ne se précipite pas. Mais notre heure viendra !
Toute l’équipe souhaite une nouvelle fois remercier Gabrielle et Etienne pour ce shooting assez fou, rempli de poésie et d’amour.